Les difficultés dÃÂintégrations pouvant survenir chez les immigrants au JaponMémoireLe 27 septembre 2005DES MASQUES ET DES HOMMESLes difficultés dÃÂintégrations pouvant survenir chez les immigrants au JaponTABLE DES MATIÃÂRESINTRODUCTION3MISE EN CONTEXTE5DÃÂVELOPPEMENT61-Des explications historiques aux difficultés d'intégration au Japon61.1.l'ère Sakoku (1639 à 1853)61.2.l'après deuxième guerre mondiale (à partir de 1945)82-Des explications politiques aux difficultés d'intégration au Japon112.1.la politique migratoire de 1990112.2.le protectionnisme des années 1990143-Des explications sociologiques aux difficultés d'intégration au Japon163.1.la culture des masques16Conclusion19Médiagraphie 10Définition des concepts11IntroductionDepuis lÃÂapparition dans les années 1990 du phénomène économique éliminant les barrières commerciales entre les pays du monde entier, communément appelé la mondialisation, les mouvements de masse des populations se font grandissants. Que se soit pour les études, la famille ou le plaisir, les raisons se font de plus en plus multiples pour voyager. Se sont souvent ces facteurs qui entraînent des millions de gens à vouloir sÃÂétablir dans un pays leur procurant une meilleure qualité de vie.
CÃÂest pourquoi le Japon, comme dÃÂautre pays industrialisé, fait face aujourdÃÂhui à une situation migratoire plus importante. Mais lÃÂaccueil réservé aux nouveaux arrivants dans ce pays est très différent de celui rêvé initialement par ces immigrants. LÃÂarrivée de ces personnes dÃÂune autre culture et dÃÂune autre mentalité entraîne une réaction prévisible chez la population japonaise qui voit des étrangers arrivés chez eux depuis à peine une centaine dÃÂannées maintenant. Plusieurs observateurs se sont questionnés sur ce phénomène contemporain japonais et une première question en est ressortie :Pourquoi certains immigrants rencontrent-ils des problèmes dÃÂintégration lorsquÃÂil sÃÂinstalle au Japon?Ce problème sera analysé sous lÃÂangle des trois disciplines que sont lÃÂhistoire, la politique et la sociologie. DÃÂun côté historique, les premiers évènements en lien de causalités avec les difficultés sont apparus dès lÃÂexpulsion systématique dÃÂune majorité dÃÂétrangers (à lÃÂexception des Chinois) dès 1639 jusquÃÂà ce que les frontières ouvrent de nouveau en 1854. DÃÂun côté politique, les lois migratoires japonaises firent lÃÂobjet de débat important à la Diete (organe exécutif japonais) qui engendra une augmentation du nombre de Canadiens possédant un visa de travail temporaire au Japon, ce nombre est passé plus précisément de 1 600 immigrants en 1980 à 11 900 en 2003. DÃÂun côté sociologique, la culture des masques quÃÂon tente a tout pris de préserver dans la société oppose radicalement sa pensée à celle possédés par les étrangers vivant en sols japonais. Finalement, une conclusion interdisciplinaire tentera de proposer une approche globale et une vision future de la situation interprétée au cours du présent mémoire.
Mise en contexteUne première distinction s'impose ici pour clarifier le travail qui va suivre.
Sur une population de plus de 127 millions d'habitants, le nombre des étrangers résidant dans le pays a depuis peu dépassé le cap du million. En 1988, le nombre des étrangers dûment enregistrés par les services de l'Immigration se montait à un peu plus de 940 000, mais le ministère de la Justice estimait à plus de 100 000 les étrangers restés dans le pays avec un visa désormais périmé. Sans parler des 120 000 Latino-américains de souche japonaise dont le traitement est particulier. Depuis, le nombre de ces derniers a sans doute doublé. Quant à celui des travailleurs étrangers en situation illégale, on estimait leur nombre à plus de 200 000 en février 1992 .
Il y aurait donc aux alentours de 1 400 000 étrangers dans le Japon d'aujourd'hui.
Sur cette masse aux limites fluctuantes, le groupe le plus important (environ 750 000 personnes) est constitué de descendants de Coréens (les Coréens sont de loin les plus nombreux avec environ 700 000 immigrants), de Taiwanais et de Chinois, la plupart amenés de force au Japon au cours de la période d'expansion de l'empire nippon soit en gros, du début du siècle à la fin de la Deuxième Guerre mondiale.
Développement1.Des explications historiques aux difficultés d'intégration au JaponLes étrangers ont depuis longtemps été la cible de confrontations dans leur milieu dÃÂaccueil. LÃÂhistoire nous rappelle que leur combat a été un des plus dur et quÃÂil est même encore très difficile pour eux dÃÂintégrer leur nouveau milieu particulièrement au Japon. Les grandes flambées dans ces antagonismes ont eu lieu durant lÃÂère Sakoku (de 1639 à 1853) et après la Deuxième Guerre mondiale (de 1945 à 1949).
1.1.l'ère Sakoku (1639 à 1853)Depuis les tout débuts de lÃÂhistoire du Japon, lÃÂisolement dû à ses frontières maritimes amenuisa considérablement lÃÂinfluence des autres civilisations sur celle japonaise. DÃÂabord Chinois et Coréens, les étrangers se sont faits rares jusquÃÂau début des années 1600. Dès lors, un mouvement migratoire important, basé sur les relations commerciales entre le Japon et lÃÂEurope, amena des techniques nouvelles qui aidèrent le Japon à se développer plus rapidement et entraînèrent avec eux, grâce à leurs missionnaires, une nouvelle religion, le christianisme. Mais malgré un engouement marqué chez les Japonais pour cette religion, en lÃÂespace dÃÂune cinquantaine dÃÂannées, cÃÂest le revirement total. àla suite d'une rébellion chrétienne près de Nagasaki, tous les étrangers (à lÃÂexception des Chinois et Coréens) résidant dans l'archipel sont déportés vers leur pays dÃÂorigine. Seuls les Hollandais obtinrent l'autorisation de tenir comptoir commercial sur l'île de Dejima, dans le port de Nagasaki. àpartir de ce jour, les Japonais décidèrent de contenir les communautés chinoises restantes dans un minuscule quartier spécial à Nagasaki. Plusieurs personnes sÃÂexpliquent mal ce changement radical des mentalités, mais cÃÂest pourtant selon plusieurs chercheurs, un phénomène explicable. Certains ont dÃÂabord cru que la société japonaise était incompatible avec les idéaux occidentaux et quÃÂune intolérance spirituelle sÃÂétait installée au pays. Mais cette théorie explique mal les succès prometteurs du christianisme au début du 16e siècle. Après avoir poussé la réflexion à un second niveau, lÃÂauteur Endymion Porter Wilkinson compris que cela provenait directement dÃÂun des traits caractérisant la civilisation japonaise et chinoise : ë Ce trait majeur commun aux deux grandes civilisations dÃÂAsie ne repose pas sur une croyance religieuse, mais plutôt sur le critère dÃÂavancée culturelle commune quant à lÃÂécriture, les rites, les coutumes et lÃÂharmonie sociale. û Cette différence est fondamentale, car elle subsiste encore de nos jours et explique la tolérance et lÃÂadaptation des pays asiatiques aux conditions contemporaines. Le christianisme lui nÃÂavait pas, et nÃÂa pas encore aujourdÃÂhui, cette tolérance. Il apportait la subjugation politique et la colonisation et cÃÂest pourquoi les Japonais ont donc commencé à sÃÂen méfier puis à le défier. Le repli géopolitique durant lÃÂère Sakoku était donc un refus de colonisation idéologique et se termina par une quasi-fermeture territoriale et sociale.
Le Japon ne sortit de son isolement volontaire que lorsque les canons du commodore Perry, de la marine de guerre américaine, vinrent menacer son indépendance en 1853. àla suite de cette crise politique, le shogun Tokugawa dut démissionner et l'empereur Mutsuhito fut installé au pouvoir en 1868.
1.2.l'après Deuxième Guerre mondiale (à partir de 1945)Le Japon s'affirma rapidement comme une puissance militaire capable, malgré son isolement prolongé, de démontrer sa supériorité aux pays voisins : il battit la Chine (1895), la Corée et la Russie (1905) et plus tard il continua dÃÂétendre ses territoires conformément au Traité de Versaille. Le 7 décembre 1941, le Japon lança une attaque aérienne contre les forces navales américaines à Pearl Harbor (Hawaii), ce qui décida les ÃÂtats-Unis à participer à la Seconde Guerre mondiale. La machine de guerre japonaise encercla rapidement la plus grande partie du Sud-Est asiatique et étendit sa domination sur toute la région jusqu'en 1943, lorsque le cours des événements se retourna contre le Japon. Les 6 et 9 août 1945, les ÃÂtats-Unis lancèrent deux bombes atomiques sur Hiroshima et Nagasaki.
Après avoir perdu contre lÃÂURSS et les ÃÂtats-Unis, le Japon nÃÂeut pas le choix de capituler le 14 août 1945. Cette défaite discrédita donc totalement les forces militaires japonaises, mais cette capitulation nÃÂen fut pas une psychologique au contraire. De 1945 à 1952, le pays fut occupé principalement par les forces américaines surtout dans le sud du pays et maintenant encore la présence de bases militaires au Japon est mal acceptée non seulement par les Japonais les côtoyant dans leur vie quotidienne, mais aussi par une large fraction de la population japonaise. Aussi, cette occupation du Japon a été marquée par des centaines de méfaits attribués en majorité à des soldats américains comme nous relate M. Bouissou dans son ouvrage : ë àdes Américains furent condamnés à la suite de leur participation dans des batailles sanglantes, des enlèvements de jeunes Japonaises ainsi que des centaines de viols. û Les Japonais en ont gardé un goût amer et les Américains leur ont fourni plusieurs raisons qui dévalorisèrent grandement les Occidentaux à leurs yeux et cette réalité est encore bien visible aujourdÃÂhui dans la tranche de population ayant vécu la bombe A.
En 1947, sous l'égide des ÃÂtats-Unis, une nouvelle Constitution fut adoptée : le pays s'engageait à renoncer à la guerre, à garantir les droits fondamentaux de l'homme et à maintenir un régime démocratique. Depuis la Seconde Guerre mondiale, le Japon entretient une force dÃÂautodéfense et les ÃÂtats-Unis assurent pour l'essentiel sa sécurité. Le gouvernement japonais réitère graduellement son autorité et son indépendance face aux ÃÂtats-Unis. CÃÂest dans cet ordre dÃÂidée que le Japon décida dÃÂaugmenter à plus de 1 % (3,179 milliards de yens) la part allouée à son armée dans son budget en 1987, soit plus que ce quÃÂils avaient convenu au départ avec les Américains de ne pas outrepasser. En 2001, ce montant se situait à 4,956 milliards de yens.
De nos jours, on se demande si le mouvement contre les bases militaires dans lÃÂensemble du Japon est fondamentalement pacifiste ou simplement anti-étranger. Nous avons constaté ultérieurement que des explications historiques peuvent justifier la mentalité plutôt négative des Japonais envers les étrangers vivant dans leur milieu. Mais, il ne faut pas voir dans les causes de ce problème que des origines historiques, les décisions politiques peuvent aussi être un facteur décisif dans cette voie quÃÂa pris au fil du temps la civilisation japonaise.
2. Des explications politiques aux difficultés d'intégration au JaponLes politiques dÃÂun pays sont souvent à lÃÂimage de sa population et celle du Japon ne fait pas exception sur ce point. Il est clair que les politiques qui ont été adoptées par les gouvernements en place depuis les années 90 nÃÂont pas suivi la tendance internationale des autres pays industrialisés. Les politiques migratoires japonaises nÃÂont pas encouragé suffisamment le recours à une main-d'ÃÂuvre étrangère stable, et ce, malgré la pression qui pouvait s'exercer à ses portes. De plus, le mouvement protectionniste qui sévit au pays depuis le repli géopolitique tente de limiter les chances des entreprises étrangères espérant percer le marché japonais. Ces deux aspects politiques peuvent être la cause, selon plusieurs observateurs, des difficultés rencontrées par les immigrants vivants au Japon. Examinons dÃÂabord le cas des politiques migratoires japonaises.
2.1.la politique migratoire de 1990Début de l'année 1986: on était alors encore au creux d'une sérieuse dépression économique, et le taux de chômage au Japon dépassait les 3%, chose qu'on n'avait pas vue depuis longtemps. La situation était vraiment inquiétante dans certains secteurs, tel celui de la construction navale, de la restauration et de lÃÂenseignement des langues étrangères. C'est ainsi que dès l'automne 1986, la main-d'oeuvre se faisant rare, une porte fut entrouverte aux travailleurs étrangers. Mais, devant la nouveauté du phénomène, les prises de conscience nécessaires pour que s'organise une défense des droits des immigrés demandèrent du temps. CÃÂest pourquoi on trouve à l'origine du mouvement de migration, des compagnies fort bien organisées d'agents recruteurs qui, dans les pays pauvres à la main d'oeuvre abondante, vont embaucher les travailleurs dont ont besoin les entreprises japonaises.
Durant les premières décennies surtout, où les agences échappaient pratiquement à tout contrôle, ce système se prêtait à tous les abus. Employés sans permis de travail et une fois leur visa de touriste périmé, sans permis de séjour les étrangers se retrouvaient pratiquement sans droits. Un des faits aggravant la situation est celui constitué des indicateurs démographiques qui annoncent une population active déclinante : son accroissement naturel, qui était de 1,4 % par an en 1970, nÃÂest plus que de 0,25 % à partir de 1990 et doit continuer à diminuer ensuite. CÃÂest donc à partir de ces données que les professionnels de lÃÂéconomie japonaise ont exercé une pression sur le gouvernement en place pour augmenter le nombre dÃÂétrangers immigrants au Japon. Le gouvernement décida finalement dÃÂouvrir un débat sur l'opportunité d'ouvrir le pays à une migration de travail. Il en résulta lÃÂadoption, le 1er juin 1990, dÃÂune loi spéciale sur lÃÂimmigration étroitement liée aux problèmes du système de travail actuel.
Cette loi donnait plus de droit aux étrangers possédant un visa de travail, mais dÃÂun autre côté interdisait tout travail rémunéré aux étrangers ne disposant que d'un visa de touriste, ou resté au Japon après expiration de celui-ci. Quant aux patrons qui les emploieraient, ils se trouvaient désormais sous la menace de fortes amendes et même de peines d'emprisonnement. Par ailleurs, cette même loi multiplie de manière prudente et contrôlée, les catégories donnant droit à des emplois de courte durée (étudiants, collégiens, stagiaires, Nikkeijin , entraîneuses, cadres étrangers). Mais elle interdit l'embauche d'étrangers à des postes non qualifiés, se qui dÃÂaprès Myron Weiner : ë est une mesure qui ignore intentionnellement la présence des travailleurs illégaux en réalité plus nombreuse que ceux qui disposent d'un statut légal û. La raison invoquée par le gouvernement : ë Les étrangers qui possèdent une qualification professionnelle peuvent, éventuellement, obtenir un permis de travail pour un temps déterminé et ainsi contribuer à l'adaptation et à la prolifération des entreprises japonaises sur le marché international. Quant aux autres, le Japon n'en a pas besoin. ûLÃÂenjeu de ce débat pour la société japonaise est principalement de préserver ë l'harmonie nationale û en limitant lÃÂimmigration de masse de travailleurs peu qualifiés, mais aussi de protéger, en moment de récession, les entreprises japonaises sur son territoire contre la concurrence des multinationales américaines.
2.2.le protectionnisme des années 1990CÃÂest au début des années 90, au moment de lÃÂéclatement de la bulle , que le gouvernement japonais adopta des mesures protectionnistes afin de combattre la récession économique anticipée à cette époque. Cette politique économique visant à protéger lÃÂéconomie nationale contre la concurrence étrangère au moyen de règles et de mesures, contrôla et limita lÃÂentrée des produits étrangers en territoire japonais. Ce phénomène causa par la suite plusieurs problèmes dÃÂordre social et organisationnel aux entreprises étrangères tentant de sÃÂinfiltrer sur le marché japonais. Deux faits distincts ayant pour cause lÃÂarrivée du protectionnisme au Japon engendrèrent une mauvaise réputation des immigrants dans lÃÂopinion publique. Premièrement : un travailleur étranger peut difficilement trouver un cadre dÃÂemploi à lÃÂoccidental, car les entreprises étrangères y sont rares. La concentration du marché de consommation (oligopole) entre les mains dÃÂun nombre très réduit de ë Sociétés de commerces généraux û (par exemple les magasins Seibu) , permet lÃÂimposition, par ses sociétés, de leur loi à la vente dÃÂun produit. Deuxièmement : Même si une société étrangère tente de pousser la vente de son produit au Japon, la population préfèrera choisir un produit fourni par une entreprise japonaise plutôt quÃÂun autre parce quÃÂil est plus facile pour les citoyens dÃÂen trouver près de chez eux et parce quÃÂils peuvent de cette façon sÃÂappuyer sur des produits ou des services faits à leur image. Comme lÃÂexpliquait dans son livre lÃÂauteur Michel Vié : ë La prépondérance du petit commerce traditionnel sur les grandes surfaces (par exemple les magasins de designers japonais dans Harajuku ), contribuent à faire écran entre les produits importés et les consommateurs japonais. ûNous avons vu que la politique japonaise a probablement poussé les gens à avoir un tempérament fermé à lÃÂétranger. De par la loi sur lÃÂimmigration instaurée en 1990 et les mesures protectionnistes, les Japonais en sont venus à la conclusion que les étrangers ne doivent pas se mêler à eux. Cette façon de voir les choses nÃÂest pas seulement dÃÂorigine historique ou politique, mais elle a aussi une provenance dÃÂordre social.
3. Des explications sociologiques aux difficultés d'intégration au JaponDans un pays tel que le Japon, la vie sociale est très importante. Vivre entouré de presque 127 millions de personnes (estimation en 2005) demande beaucoup de discipline à sa population. LÃÂensemble des structures sociales et des manifestations intellectuelles, artistiques, religieuses qui définissent la société japonaise dÃÂaujourdÃÂhui sont fortement influencés par la tradition et la langue japonaise. Ce peuple possède une culture très distinctive, et cÃÂest sûrement ce qui en fait une des plus grandes forces de sa société.
3.1. la culture des masquesCette culture met de lÃÂavant plusieurs comportements qui vont à lÃÂopposé dÃÂautres cultures, comme celle américaine. CÃÂest peutÃÂêtre pourquoi plusieurs étrangers éprouve de la difficulté à se faire accepter dans leur milieu de vie au Japon. Le point le plus divergeant entre la culture nippone et les autres cultures est dÃÂaprès M. Tatsuheki, professeur à lÃÂUniversité Laval, lÃÂapparence des masques : ë Dans le visage de lÃÂautre et de soi, le masque tient une place essentielle au Japon. Le terme omote signifie à la fois, le ë masque û et le ë visage û en japonais. ûComme lÃÂa montré le sociologue David Riesman, il existe bien au Japon, dans la langue comme dans la culture, une propension à concevoir le monde comme un ensemble de façades (omote) changeantes et réversibles. Le sociologue a régulièrement souligné que les Japonais sont extrêmement sensibles au regard et à lÃÂopinion dÃÂautrui. Pour comprendre cette affirmation, regarder sans interruption un japonais dans les yeux si vous avez la chance un jour de discuter avec un dÃÂentre eux. Vous verrez quÃÂil est très gênant pour eux de parler avec une personne qui le regarde dans les yeux, car ce geste est surtout significatif dans leur culture dÃÂune attirance sexuelle pour lÃÂautre. Mais pour un étranger, il peut sembler normal de regarder son interlocuteur dans les yeux lors dÃÂune conversation sans pourtant avoir aucune arrière-pensée. CÃÂest ce genre de situation propre à la culture japonaise qui entraîne des malaises profonds entre les individus lorsque vient le moment pour un étranger de vivre une vie sociale active. CÃÂest cette mentalité bien encrée du ë soto û (extérieur) et du ë naka û (intérieur) qui bloque, en quelque sorte, lÃÂharmonie des Japonais et des étrangers. Le soto et le naka sont des entités indissociables dans la culture japonaise, comme le masque qui protège lÃÂintérieur de lÃÂextérieur. Même si les Japonais se montrent extrêmement curieux et gentils avec les immigrants dans leur entourage, ces étrangers voient très rapidement quÃÂils ne font pas réellement partie du groupe (de la société). Par exemple, si une personne aux allures occidentales semble avoir besoin dÃÂaides, personne ne lui en donnera à moins quÃÂil nÃÂen demande lui-même. Autre exemple, un étranger doit la plupart du temps sÃÂinviter lorsquÃÂil veut sortir avec dÃÂautres Japonais, car ceux-ci ne veulent pas vexer les autres membres du groupe par la présence dÃÂun étranger parmi eux.
On peut donc en venir à un constat sur ce concept. L'ensemble de ces éléments sociaux fait que les Japonais ne peuvent être que dans une situation difficile dans leurs relations avec les étrangers. La seule alternative pour le moment est dÃÂaméliorer les connaissances de la culture japonaise chez les autres peuples. Le jeu de masque entre apparence et réalité, peut nous les faire voir comme des hypocrites. Mais de leur côté, ce jeu de masque nous fait paraître à leurs yeux comme des barbares. Et cela, même les échanges culturels, même le grand nombre de Japonais venant aujourd'hui au Canada, même le grand nombre de Canadiens se rendant au Japon, ne pourra pas changer la situation rapidement. Elle est dure à surmonter, car nous sommes fondamentalement opposés par une difficulté de communication.
Conclusionàla lumière de tout ce qui a été dit précédemment, peut-on maintenant expliquer pourquoi certains immigrants rencontrent des problèmes dÃÂintégration lorsquÃÂil sÃÂinstalle au Japon? Les experts à ce sujet le croient maintenant. Principalement parce que des événements ont amené la population à craindre le monde extérieur. DÃÂabord durant lÃÂère Sakoku avec son repli géopolitique puis avec lÃÂavènement de la 2e Guerre mondiale qui plongea le Japon dans la misère à partir de 1945. En second lieu, parce que les actions posées par le gouvernement pour protéger le système en place ont mené à lÃÂinstauration de la loi sur lÃÂimmigration de 1990 puis de mesures protectionnistes. Ces deux faits ont rendu difficile la venue des étrangers au pays donc les Japonais ne sont pas encore habitués à leur présence parmi eux. En dernier lieu parce que la vie sociale des Japonais nÃÂaccepte pas la présence dÃÂétrangers dans ces rangs. La culture traditionnelle entraîne la population native à les exclure de leur groupe par souci dÃÂapparence auprès dÃÂautrui parce que les étrangers nÃÂont pas à leurs yeux la capacité dÃÂagir et de penser comme eux en société.
Mais malgré ces difficultés, lÃÂintérêt pour ce pays est grandissant dans le monde. LÃÂinfluence de la culture japonaise sÃÂétend maintenant partout. Que se soit grâce aux mangas, aux émissions de télévision pour enfants, à la mode, à la technologie, à lÃÂarchitecture et jÃÂen passe, un engouement cÃÂest formé. Il nÃÂest même plus inhabituel de voir des étudiants américains et européens apprendre le japonais. DÃÂoù vient cet engouement massif pour le ë Japanese way of life û? Une analyse approfondie sur le sujet pourrait nous aider à mieux répondre à ce genre de question. Mais en attendant les réponses, une chose est sûre, le Japon devra au cours des prochaines années, établir un nouveau consensus national tourné vers la globalisation sÃÂil veut continuer son ascension fulgurante parmi les plus grands et les plus beaux pays de ce monde.
MédiagraphieLivres:1.Bouissou, Jean-Marie, Le Japon depuis 1945, Paris, Plon, coll. ë Terre humaine û, 1991, 214 pages.
2.Gottlieb, Nanette, Language and society in Japan , Cambridge, UK, 2005, Cambridge University Press, 169 pages.
3.Japanese society for aesthetics. Looking at japanese culture , Tokyo, Japan, 2004, Japanese Society for Aesthetics, 236 pages.
4.Jugon, Jean-Claude, Les phobies sociales au Japon, Paris, ÃÂditions ESF, 1998, 278 pages.
5.Omoto, Keiko et Macouin, Francis , Quand le Japon s'ouvrit au monde : EÃÂmile Guimet et les arts d'Asie, Paris, 2001, DeÃÂcouvertes Gallimard, 192 pages.
6.Pelletier, Philippe, Japon : crise d'une autre modernitéÃÂ, Belin, Paris, 2003, édition Asie plurielle, 207 pages.
7.Sabouret, Jean-Francois, Japon, peuple et civilisation, Paris, 2004, La DeÃÂcouverte, 232 pages.
8.Vié. Michel, Le Japon et le monde au XXe sieÃÂcle, ÃÂParis, 1995, édition Masson, collection Histoire contemporaine geÃÂneÃÂrale, 303 pages.
9.Weiner, Myron, Temporary workers or future citizens? Japanese and U.S. migration policies, Londres, MacMillan Press, 1998, 486 pages.
10.Wilkinson, Endymion Porter Le Japon face aàl'Occident : images et reÃÂaliteÃÂs . Bruxelles, 1992, éÃÂditions Complexe, collection Questions au XXe sieÃÂcle,. 387 pages.
Articles scientifiques :11.Eisenstadt Shmuel Noah, ÃÂLÃÂexpérience historique japonaise:paradoxe dÃÂune modernité non axialeÃÂ, dans Revue internationale des sciences sociales, n 151, 1997, pp.129-140.
12.Hein Laura E.,ÃÂIn search of peace and democracy: Japanese economic debate in political contextÃÂ, dans The Journal of Asian Studies, n 53-3, 1994, pp. 752-778.
Personne ressource :13.Tatsuheki, Mizoe. Professeur de japonais au niveau avancé à l'Université Laval, Québec.
Définitions des conceptsHistoire :ÃÂtude des faits qui ont marqué le passé dÃÂune collectivité ou dÃÂune activité humaine, connus par des documents écrits ou audiovisuels.
ÃÂre Sakoku :Point de départ dÃÂune chronologie dÃÂisolement. Période historique japonaise, qui débuta en 1639 jusquÃÂen 1853, correspondant au début de lÃÂextradition massive étrangère au Japon.
2e Guerre mondiale :Guerre qui fut déclenchée par lÃÂAllemagne en 1939 et qui prit des proportions mondiales avant de se terminer en 1945.
Politique :pratique du gouvernement dÃÂun ÃÂtat, dÃÂune nation. Ensemble des affaires publiques dÃÂun ÃÂtat, dÃÂune nation.
Politique migratoire :ÃÂnoncé général ou énoncé de principes servant à indiquer la ligne de conduite adoptée par le gouvernement japonais dans le secteur migratoire, pour la gestion de lÃÂarrivée dÃÂune population humaine dÃÂun pays ou dÃÂune région vers le Japon.
Protectionnisme :Politique économique visant à protéger lÃÂéconomie nationale contre la concurrence étrangère au moyen de règles et de mesures qui contrôlent ou limitent lÃÂentrée des produits étrangers.
Sociologie :ÃÂtude scientifique de ce qui se rapporte à la société humaine.
Culture :Ensemble des structures sociales et des manifestations intellectuelles, artistiques, religieuses qui définissent une civilisation, une société par rapport à une autre. Ensemble des formes acquises de comportement de lÃÂêtre humain.